Maladie rénale chronique : comment en arrive-t-on là ?

DFGe et RAC définissent la MRC et son degré de gravité

Le DFGe mesure le débit dans les glomérules, filtre des reins entre le sang et l’urine, reflet de la fonction rénale, dont l’objectif est le maintien de l’équilibre du milieu intérieur de l’organisme.
À l’état physiologique, le DFGe est d’environ 100 ml/min/1,73 m2, calculé à partir de la créatininémie, selon la formule dite CKP-EPI, la plus couramment utilisée dans les laboratoires. Elle peut être exprimée en pourcentage, ce qui est plus explicite pour le patient : un CKP-EPI de 50 ml/min/1,73 m2, par exemple, signifie que les reins fonctionnent à 50 % de leur capacité. Elle permet aussi d’évaluer la gravité de l’insuffisance rénale : lorsque les reins fonctionnent à moins de 60 %, on parle d’insuffisance rénale (IR) débutante, à 30 % d’IR avancée,
à 15 % d’IR pré-terminale.

Le DFGe est donc une photographie de la fonction rénale à l’instant présent.

Le RAC est calculé à partir d’un prélèvement d’urine, de préférence matinal.

À l’état physiologique, les glomérules retiennent l’albumine. Lorsqu’ils commencent à souffrir, ils en laissent passer des quantités plus ou moins importantes et, plus le RAC s’élève, plus le patient va perdre rapidement de la fonction rénale : le RAC est donc une vidéo de l’avenir et l’on peut prévoir que lorsqu’un patient a un RAC élevé, il peut perdre jusqu’à 5 à 10 % de sa fonction rénale par an.

Au vu des résultats de ces deux examens (DFGe et RAC), il est donc possible de diagnostiquer une MRC et de prédire son rythme d’aggravation.

MRC, diabète, HTA et obésité : des liaisons dangereuses

Ces pathologies induisent toutes les trois une hyperfiltration au niveau des reins, mais pour des raisons différentes.
En cas d’HTA, l’hypertension touche les reins, induisant, de facto, une hyperfiltration.
Dans l’obésité, les glomérules doivent travailler plus que d’ordinaire, car il existe une disproportion entre le volume corporel à « nettoyer » et les capacités rénales à le faire, ce qui peut aboutir à une intoxication de l’organisme et à une albuminurie. En outre, la graisse viscérale liée à l’obésité est très inflammatoire, et l’inflammation qu’elle entraîne va léser les vaisseaux glomérulaires. Les reins étant destinés à filtrer le sang, ce sont les organes les plus vascularisés de l’organisme.

Dans le cas du diabète, l’hyperglycémie induit une glycosurie, qui surpasse la capacité des tubules rénaux à réabsorber le glucose. Cette fuite urinaire du glucose entraîne une augmentation du débit de filtration glomérulaire et provoque une diurèse osmotique avec pertes associées d’eau et d’électrolytes.

Qu’il y ait HTA, obésité ou diabète, l’hyperfiltration dans les filtres glomérulaires entraîne une hyperpression qui va léser progressivement les glomérules. Ceux-ci vont laisser passer de l’albumine, et l’albuminurie est elle-même toxique pour les tubules qui affinent la composition de l’urine définitive. Le rein devient alors très inflammatoire et progressivement fibreux et scléreux.
Ces trois pathologies sont responsables des deux tiers des MRC. Parmi les autres causes, il faut citer certaines maladies génétiques et auto-immunes, des causes toxiques, les AINS, les abus d’antalgiques et des causes infectieuses.

MRC et vieillissement de la population

Il est physiologique de perdre de la fonction rénale avec l’âge : on estime que, dans la population générale, une personne perd en moyenne 1 % de fonction rénale par an à partir de 40 ans. Évidemment, l’HTA, l’obésité et le diabète sont des facteurs aggravants, qui vont accélérer le vieillissement physiologique de la fonction rénale.

Propos recueillis auprès du professeur Vincent Esnault, service de néphrologie – transplantation – dialyse, hôpital Pasteur, Nice, par le docteur Catherine Bouix

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